Une dévorante passion
Le cœur bleu, c’est l’histoire d’une passion fulgurante comme savent l’être les amours de vacances qui se transposent à distance. Des amours qui font autant de bien qu’elles font du mal. Juliette, une femme d’âge mûr journaliste et auteure, rencontre Roméo, musicien caribéen dans la mi-trentaine, lors d’un voyage dans le Sud.
Le récit débute sur une scène de sexe qui, je l’avoue, m’a laissée un peu interdite. Pas parce que je suis prude, mais parce que je ne vois pas la pertinence de certains détails. Bref, Juliette et Roméo sont foudroyés par une passion qui les dévore. Mais voilà, ils forment un couple que tout sépare : l’âge, la langue, le pays, les milieux socio-économique et culturel.
Toutefois, leur plus grand obstacle réside dans le fait que Juliette ne sait pas se laisser aimer. Elle est seule depuis de nombreuses années, s’étant dévouée à ses fils et son travail. Elle a l’impression d’avoir le cœur sec, fermé et Roméo doit sans cesse la rassurer pour enfin créer une fissure dans la muraille protectrice qu’elle a érigée. Percluse de doutes, elle a du mal à croire que ce jeune homme puisse l’aimer, elle qui a la fin quarantaine. Elle n’arrive pas à lâcher le rationnel et se laisser vivre à plein cet amour. Eh que la peur d’avoir mal nous sabote! La perte de contrôle et de ses repères lui est très difficile et l’essentiel du texte se concentre sur ce qui se passe en elle face à cette relation. On comprend rapidement ce qu’elle est venue bouleverser pour Juliette. Peut-être l’auteure passe-t-elle un peu trop de temps à essayer de nous le démontrer, les doutes reviennent sans cesse.
L’histoire au contenu que l’on soupçonne autofictionnel dont plusieurs indices sont disséminés dans le texte, met admirablement en lumière le propre de ce type de relation. Les moments idylliques quand on est ensemble, l’un est en vacances, donc loin des responsabilités quotidiennes, et la douleur d’être séparés.
Tout au long du texte, l’auteur tente de tisser un lien entre l’amour, la mort et ses personnages et ceux de Shakespeare. C’est vers la fin que le spectre de la mort apparaît dans Le cœur bleu. Cependant, ce lien me semble un peu ténu, en ce sens que ce n’est pas à cause de la séparation en raison de l’amour interdit qui fait que la mort rôde. Elle établit toutefois habilement un lien entre l’écriture, la danse et l’amour où tout est une question de rythme, de sentiments, de tripes. Aline Apostalska a une écriture toute poétique et ce roman est comme une longue et lancinante chanson d’amour. Le texte est d’ailleurs parsemé de poèmes en espagnol, dont la traduction française se trouve à la fin, ce que j’ai découvert à la toute fin ;-)
Si vous avez envie de lire sur une passion irrésistible et tout ce qu’elle entraîne, voici une lecture pour vous.
Yannick Ollassa / La Bouquineuse boulimique
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