Petite-Ville
J’ai été résolument accrochée à chaque page, à chaque mot de ce roman dystopique à suspense dans lequel on cherche le meurtrier de Simon James, un journaliste et auteur connu pour ses critiques sociales. Mia, sa sœur adoptive, éprouvée par son décès et le placement de sa propre fille, tente de lever le mystère qu’est l’identité de celui qui l’a assassiné.
Les injustices sociales et l’égalité des individus sont toujours au centre des écrits de Mélikah Abdelmoumen. Ici, d’une langue tranchante, sans compromis et avec des touches de son sarcasme immanquablement délicieux, l’écrivaine dénonce les abus de pouvoir, la cupidité et la corruption. Elle s’attaque notamment aux préjugés, à la stigmatisation, au racisme dont sont victimes les gens à faibles revenus, les laissés pour compte, et toute autre personne non issue de la minorité riche, masculine et blanche. etc. Elle braque aussi les projecteurs sur l’influence des médias et des GAFAM dans les mouvements sociaux et la façon dont ils modulent l’opinion publique.
Dans Petite-Ville, Abdelmoumen illustre nettement qu’on ne naît pas avec l’égalité des chances et ce n’est pas simple de « s’en sortir », de transcender ses circonstances de vie, ses expériences. Un élément fort intéressant que l’autrice souligne et dont on n’ose pas mentionner, c’est que les gens « hors Zone » (lire les non pauvres et non démunis) aiment bien utiliser en exemple les personnes qui « se sont libérées » de la pauvreté, de la violence, de la précarité comme argument afin de dire que tout est possible et que quelqu’un qui n’arrive pas à améliorer ses conditions de vie soit se complaît dans son état ou est juste paresseux. Ce qui revient d’une certaine manière à culpabiliser ceux qui n’y parviennent pas, et ainsi à les maintenir où ils sont.
Ça, c’est une partie de ce que Petite-Ville touche. En fait, il y a tant de sujets abordés que je pourrais en parler sur deux pages, sauf que je perdrais ton attention. Donc, j’ai essayé de faire ça court et simple. Mais je n’ai jamais été douée pour la synthèse alors j’aimerais m’excuser à Mélikah de ne pas rendre justice à son roman.
Sinon, le ton m’a vraiment plu. Le fait de sentir l’inspiration de John Stewart dans la voix de Simon James. C’est absolument succulent ! De plus, ça permet un certain équilibre avec l’aspect sombre des réalités des laissés pour compte.
Une magnifique critique sociale couplée avec une brillante analyse de psychologie, notamment de la réponse au trauma, le tout présenté sous forme de dystopie comprenant une enquête passionnante. On se divertit et on réfléchit sur plusieurs phénomènes sociaux. Une formule gagnante, quoi !
J'ai tellement hâte d'y plonger le nez!
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