Ce qu'on respire sur Tatouine

 Ce qu'on respire sur Tatouine, Jean-Christophe Réhel, Del Busso


Grande fan de Star Wars moi-même (mais juste des trois originaux), la première fois que j’ai aperçu le titre de ce roman, je me suis dit que je devais le lire. Je n’ai pas été déçue.

Dans un texte continu, c’est-à-dire sans chapitres, Jean-Christophe Réhel nous plonge dans le quotidien de son alter ego, qui publie des recueils de poésie et a la fibrose kystique. 

C’est un gars qui a le sentiment qu’il ne vaut rien, qu’il n’est rien (sûrement parce qu’il se regarde avec les yeux de la société qui juge que tu ne vaux rien si tu n’as pas une job, pis que tu payes tes comptes, et tout le tralala). Il faut dire qu’il ne garde pas ses emplois, parfois à cause de sa santé (il doit parfois suivre des traitements durant plusieurs semaines), d’autres fois parce que, ben, il ne fait pas attention et il s’en fout un peu. J’veux dire, on parle d’un gars qui, alors qu’il travaille chez Super C pendant une journée particulièrement enneigée, fait des anges de neige dans le stationnement. Quant à sa santé, il fume parfois, il boit du Chemineau et il mange du McDo et des Sidekicks, ces mauvaises pâtes en sachet. Bon, sur ce dernier élément, quand on n’a pas beaucoup d’argent, c’est pas mal difficile de bien s’alimenter. Sinon, mon hypothèse qu’il s’agisse soit d’auto-destruction ou d’abdication. Comme si ça ne valait pas la peine de faire des efforts, parce qu’il se sait condamné, ou qu’il devra manquer quand il devra aller à l’hôpital. Épée de Damoclès, pis toute. Il a pourtant l’air de (même s’il est triste) trouver tout le monde sympathique. D’où vient cette tristesse? De s’être toujours su plus ou moins condamné? D’ailleurs la phrase : « je suis un fantôme » revient souvent.


Quelles que soient les raisons, il ne « vit » pas vraiment sa vie, étant très souvent en train de fabuler sur Star Wars ou des films plutôt qu’à chercher à accomplir quelque chose. Ce serait aisé de le juger et de dire c’est un chokeux. C’est difficile de s’imaginer et SURTOUT de comprendre quand on ne vit pas avec une maladie chronique et dégénérative depuis la naissance.


Cette maladie est omniprésente, glaire pis toute, tout au long du récit, puisqu’il est impossible pour une personne atteinte d’en faire abstraction. Mais à mon avis, on ne va pas dans le pathos. Ce n’est pas un texte larmoyant, au contraire, c’est un texte avec une grande part d’humour et de la magie de Star Wars, qui, en quelque sorte, vient alléger sa réalité. Par exemple, il surnomme sa collègue de travail Amydala, le lugubre sous-sol où il loue une chambre à Normand, c’est Dagobah, la planète qui a vu naître Luke Skywalker.


C’est un roman drôle, dépaysant, qui fait réfléchir en même temps. Le narrateur est sympathique et nous entraîne dans le flot de ses pensées et de ses tentatives pour donner sens à sa vie. De ce côté, il n’est pas seul, on cherche un peu tous à donner un sens à notre vie, à un moment ou un autre de notre existence. Voici une belle oasis pour se reposer et peut-être aller plus loin dans notre propre réflexion.

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