David Goudreault vient de se hisser à un tout autre niveau avec «Ta mort à moi»
Quel roman foisonnant, que le dernier roman de David Goudreault. Bien qu’il soit très différent de la trilogie de la Bête, certains thèmes se recoupent. Notamment ce que Tupac Shakur appelle « Thug life » qui est l’acronyme de « The hate ugive little infants fucks everbody » dont la traduction libre est « la haine que l’on donne aux petits baise tout le monde ».C’était le message de La Bête, et c’est encore présent ici, bien qu’un peu plus dilué.
Parsemé qu’il est de référence à la littérature, ce dernier roman qui se double également d’un beau témoignage d’amour de la littérature. Par l’entremise du narrateur, qui ébauche de la biographie de la poétesse maudite Marie-Maude Pranesh-Lopez. Son enfance difficile notamment à cause de sa « laideur », de son père trop occupé à « rédiger » un ouvrage de croissance personnelle, d’un jumeau malade qui a tout l’amour de sa mère, même après sa mort. Sans compter que la jeune fille est particulièrement douée, mais pas du tout stimulée à développer ses forces, hormis pour les dictées obligatoires que sa mère lui inflige chaque soir.
La quête de la liberté, les relations familiales, la vie, la mort et le deuil, la criminalité, les gens que l’on considère comme étant marginaux composent ce brillant roman de l’auteur qui n’a rien perdu de sa superbe. Il possède toujours son sens de la formule et sa capacité à nous faire réfléchir. Il y a de ces passages simplement sublimes qui nous transportent dans une profonde réflexion sur le monde qu’on habite.
Sur la « fameuse » résilience et l’ésotérisme, le discours de l’auteur se résume à ceci : tout n’est pas possible, on n’est pas tous résilients. Aimer et être aimé sont non seulement complexe, mais il semblerait que ce n’est pas à la portée de tous.
Ratissant plus large, il pose une question très actuelle : doit-on séparer l’œuvre de l’artiste (violents, violeurs, etc.) ? : « Se priverait-on du théorème de Pythagore ou des inventions de Léonard De Vinci sous prétexte qu’ils pratiquaient une pédophilie bien de leur temps ? » Or, pour l’art, on appelle au boycottage. Il y a matière à cogiter là-dessus.
J’aimerais vous citer quelques phrases que j’ai particulièrement appréciées :
« Combien d’enfants se sont pendus au bout de liens d’attachement qu’ils n’ont jamais eus ? »
« Les adultes accordent plus d’importance à leurs minimes nécroses qu’aux blessures initiales, les plus profondes, les plus insoutenables. Ils se moquent des enfants, de leurs enivrements et de leurs détresses. »
« L’humain est de ces choses que l’on doit briser pour en révéler le cœur. »
« Arracher les ailes d’un papillon n’en fera pas une chenille. Certaines actions sont irréversibles, en amour comme en mutilation. »
« La mort n’est pas une finalité, mais un processus… »
Moins trash que les premiers romans, il est tout de même sombre, posant un regard réaliste sur les conséquences de la négligence et des blessures d’enfance. À mon humble avis, l’auteur vient d’entrer sur la liste des auteurs québécois incontournables, en raison de son écriture magistrale et de l’aspect social de ses écrits.
Cher David,
Les choses ont fait en sorte que je te lise tranquillement, à petite dose. La vie est bien faite, dit-on. Ouais, je sais, tu n’es pas particulièrement adepte de ce dicton qu’on utilise à toutes les sauces pour donner un sens à la souffrance. Il n’en demeure pas moins que j’ai savouré chaque page de ce quatrième opus romanesque.
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