L'amour peut-il triompher de tout?

Huit ans après son dernier bouquin, Geneviève Jannelle est de retour avec un nouveau roman.

Quand Anaïs rencontre Éden, l’homme qui deviendra l’amour de sa vie, elle se doute que leur parcours ensemble ne sera pas sans défis, comme tous les couples. Elle n’avait aucune idée des tests que la vie réservera à son amour. Éden est atteint d’une maladie dégénérative mortelle dont l’espérance de vie des personnes atteintes est d’environ 40 ans. Bien que son amoureux lui conseille fortement de le quitter, car ce sera un périple imprévisible, dur et taxant. Qu’à cela ne tienne, elle choisit de l’accompagner, quelles qu’en soient les conséquences et plonge dans la réalité de proche aidante.

Prendre son souffle est tout petit en volume, mais dense en émotion. Si l’élément se retrouve dans ses précédents opus, il y a un aspect qui est plutôt différent. Alors que ses précédents personnages affichaient un cynisme grinçant (qui est la marque de commerce de Jannelle), ce n’est pas du tout le cas d’Anaïs ici. C’est tout en douceur et en proie à de nombreux déchirements qu’Anaïs s’adresse à Éden dans une longue missive.


C’est avec beaucoup de sensibilité que l’autrice dépeint les dilemmes et souffrances des proches aidants et de leur être aimé. Même s’il est dense en émotions, il n’y a pas de pathos. C’est un vibrant témoignage de ce que vivent ceux qui doivent prendre soin d’une personne qui dépérit constamment. 

D’un point de vue personnel, je ne suis pas proche aidante, mais je suis proche aidée. Je me suis reconnue dans plusieurs aspects abordés dans le récit, notamment ce qui entoure la capacité à marcher et la perception extérieure des gens. Quand on commence à avoir des problèmes d’équilibre, les gens ont l’impression qu’on est soûl et que c’est pour ça qu’on a une démarche « hésitante ». Je m’étais d’ailleurs fait faire un chandail disant : « Je ne suis pas soûle, j’ai la sclérose en plaques ». Aussi, il y a un passage où Anaïs mentionne qu’Éden a de la difficulté à coordonner ses pieds. Ah… saviez-vous en fait qu’il faut maîtriser sept mouvements en plus de garder l’équilibre pour marcher? Bref.


Je suis heureuse de constater que Geneviève Jannelle aborde la question taboue de la transformation de la sexualité en situation de perte d’autonomie physique du point de vue de la personne aidée tout comme de la personne aidante. Facette qui est souvent occultée malgré qu’elle soit importante et parfois source de frustration, qui s’ajoute à de nombreuses autres. 


On ne sait jamais dans quelle aventure on s’embarque quand un proche est gravement malade et ici le lecteur réalise qu’on prend des décisions, au nom de l’amour, dont on sous-estime souvent les conséquences. 

Un roman émouvant et réaliste qui touchera plus d’une personne, qu’on soit dans cette situation ou non. Bon retour Geneviève! Bien heureuse de te relire, en souhaitant ne pas avoir à attendre huit ans pour le faire à nouveau. Une si belle plume, ça se partage

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