The Other Black Girl / Black Girl, de Zakia Dalila Harris

English Review follows

Thématique du mois de l’histoire des noir.e.s

Les deux prochaines chroniques ( incluant celle-ci ), vont avoir un lien ensemble. Je n’ai pas acheté les livres en même temps, ni ne les ai lus en même temps, mais je me suis dit que tant qu’à faire, je les publierais l’une après l’autre. 

Dans une douce satire, Zakiya Dalila Harris présente une intéressante analyse du vécu des individus BIPOC (black, indigenous and people ocolor, ou en Français PANDC pour personnes autochtones, noires  et dcouleur) dans les milieux de travail. Ici, ça se passe aux États-Unis, mais le lieu importe peu puisque les dynamiques décrites s’observent ailleurs dans le monde. 

 

Nella Rogers occupe un poste d’adjointe à l’édition dans la prestigieuse maison d’édition Wagner.  Depuis deux ans elle bosse d’arrache-pied dans l’objectif de grimper les échelons. Le monde de l’édition est un où les employés sont majoritairement caucasiens, aussi elle est la seule femme afrodescendante au sein de l’entreprise. Il y a bien eu une éditrice noire il plusieurs années, mais celle-ci a disparue dans la nature il y a 30 ans. Nella souhaite fort qu’il y ait une autre personne BIPOC. Bien sûr, elle l’espère pour le bien de la société et de la communauté, mais également pour elle-même, car elle se sent un peu isolée et pas très comprise alors qu’elle avance des points de vue. Puis un jour, elle hume une odeur qu’elle croit reconnaître, celle d’une crème bouclante. Eh oui, une nouvelle éditrice adjointe se joint à l’organisation et c’est une Black Girl, fière de sa culture, au grand bonheur de Nella. Elle se réjouit d’avoir quelqu’un qui possède un bagage semblable au sien. D’autant plus que Hazel, l’autre fille noire, est assurée et enthousiaste à l’idée de faire équipe avec elle. Le moral de Nella est au beau fixe. Jusqu’au jour où elle trouve des messages de menaces sur son bureau. 

  

(The Other) Black Girl est original et transcende les genres littéraires. Au départ, c’est un roman contemporain qui vire au suspense… avec une touche de fantastique. Le rythme y est plus lent qu’un thriller pur et dur, mais il captive et intrigue. Avec humour et légèreté, Harris aborde des sujets critiques que sont ceux de la diversité en entreprise, du racisme ou des micro-agressions et de ce qu’ils entraînent. Le texte suscite la réflexion sur la nécessité que certaines personnes éprouvent de changer leur comportement, leur apparence (white washing), leur langage (code switching) pour avancer professionnellement, croyant à tort ou à raison, qu’elles n’y arriveront pas sans cela. L’autrice appelle également à vérifier si nous avons des préjugés, nos biais cognitifs en rapport à la diversité.

 

Bien qu’il y ait des éléments fort créatifs, l’écriture d’Harris n’est cependant pas parfaite. Elle laisse dépasser quelques fils, n’évite pas quelques maladresses comme certaines intrigues qui sont abandonnés, des trucs qu’on voit venir, mais d’autres pas du tout. Elle fait toutefois preuve d’originalité et glisse de petits détails qui passeront inaperçus pour un.e lecteur.rice caucasien.ne. Par exemple, quand elle décrit un de ses personnages féminins noirs, on sait quel type de cheveux elle a. Ça paraît insignifiant, mais leur chevelure fait souvent réagir. Si elles ne les lissent pas, les boucles dérangent parfois : gros afro, tête rasée, dreads, tresses, ça semble fasciner ou gêner (sans compter les gens qui veulent les toucher comme si c’était une curiosité). Je vous donne un exemple de ma vie personnelle : lorsque j’ai arrêté de lisser ma tignasse, un collègue de travail m’avait dit « ça fait “ethnique” tes cheveux ». Si ça n’est pas une micro-agression… 

 

Pour la version française, Calmann-Levy a décidé de ne pas franciser le titre et de retrancher le « The Other ». Ce choix, j’avoue ne pas le comprendre, car tout le propos du roman, c’est qu’il y a une autre fille noire. Clairement, ils n’ont pas saisi l’importance de cette nuance, préférant miser sur un intitulé plus cool en se disant que les Français ne pouvaient pas comprendre ces deux mots. Bon, je blague… un peu.  ;-) 

 

Une subtile, mais non moins efficace critique sociale, si l’on est ouvert à cela. Sinon, c’est un roman certainement divertissant qui ne concerne pas que les Black girls

 

 
In a gentle satire, Zakiya Dalila Harris presents an interesting analysis of the experience of BIPOC (black, indigenous and people of color) individuals in the workplace. The book is set in the United States, but the country doesn't matter much since the dynamics described are observed elsewhere in the world.
 
Nella Rogers works as a publishing assistant at the prestigious Wagner publishing house. For two years she has been working hard with the aim of climbing the ladder. The publishing world is one where the employees are predominantly Caucasian, so she is the only Afro-descendant woman in the company. There was a black editor several years ago, but she disappeared out of the face of the world 30 years ago. Nella wishes there other BIPOC people at Wagner’s not only so she could feel less isolated and misunderstood as she puts forward points of view, but also because diverse voices should be heard. Then, one day, she smells a sent that she recognizes, that of a Cocoa Butter curling cream, but a little different. And right she is, a new publishing assistant has been hired. Hazel is black, from Brooklyn and proud of her culture, to Nella’s delight. She is happy to have someone who has a similar background. Especially since Hazel is excited at the idea of teaming up with her to make their voices heard. Nella's couldn’t be happier... until finds threatening messages on her desk. 

While there are strong creative elements, Harris's writing isn't perfect. She lets a few threads stick out, does not avoid some faux-pas like certain intrigues that are abandoned and things that we see coming. However, she shows originality and slips in small details that probably will go unnoticed by a Caucasian reader. For example, when she describes one of her black female characters, we know what type of hair she has. It seems insignificant, but black women’s hair often makes people react. If they don't straighten them, curls sometimes bother: big afro, shaved head, dreads, braids, it seems to fascinate or annoy (not to mention people who want to touch them as if it were a curiosity). I'll give you an example from my personal life: when I stopped straightening my hair, a co-worker told me "it makes your hair 'ethnic'". If that's not a micro-aggression...

For the French version, Calmann-Levy decided not to translate the title and to remove “The Other”. This choice, I confess to not understanding it, because the whole point of the novel is that there is another black girl. Clearly, they did not understand the importance of this nuance, preferring to bet on a cooler title by taking for granted that French speaking people could not understand these two words. Well, I'm kidding… a little. ;-)

A subtle, never the less effective social critique, if one is open to it. Otherwise, it's a certainly entertaining novel that's not just about Black girls.


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