Conduire à sa perte, de Jean-Nicolas Paul

J’ai eu de la difficulté à rédiger mon avis sans divulgâcher. Quelle tâche ardue ! Cependant, il faut que j’en dise certaines choses. J’aimerais commencer par mentionner que je ne suis tout de même pas totalement à l’aise avec le micro roman où il est question de violence conjugale.  

Dès les premières pages de lecture, j’ai eu la frousse. J’ai eu peur que l’auteur nous expose une histoire de la violence conjugale où l’homme justifie ses actes. Le narrateur relate très, très, très peu de bons aspects de sa blonde, il la présente un peu comme une folle furieuse. Il s’agit bien sûr de sa perception. Il se campe dans une posture victimaire face à sa vie et c’est difficile à lire. 

 

Cependant, quand on va jusqu’à la fin, ça apaise légèrement l’effet. La version de la conjointe permet de saisir qu’elle a la perception que c’est Alexandre qui est « fautif ». Ce qui fait voir au lecteur qu’il y a une question de perception. Que tout n’est pas tout noir ou tout blanc. Par contre, ces nuances trop discrètes et beaucoup trop tardives. Je n’y aurais pas eu accès si je n’avais, comme j’en avais beaucoup envie, pas terminé le livre. Oui, le fait d’avoir la version de l’homme, ininterrompue, ça peut permettre de ressentir de l’empathie pour lui. Ce que Jean-Nicolas Paul a sûrement souhaité que le lecteur fasse, sinon il n’aurait pas écrit son texte, surtout pas de cette manière. Il n’en demeure pas moins que c’est un risque énorme que l’auteur et l’éditeur ont pris. 

 

Paul ne veut pas cautionner la violence, il ne le fait pas. Selon lui, il fait « une description phénoménologique de la violence », cependant, ma perception est qu’il présente ici une situation « x » qui n’est pas nécessairement généralisable. En tout cas, c’est ce que j’ai ressenti pour la majeure partie du récit. Je trouve que c’est délicat comme publication. Certaines personnes violentes pourraient lire ça et se dire que c’est l’autre qui est responsable. Se sentir… peut-être pas justifiées, mais se dire « bon, j’suis pas tout seul », mais pas dans un sens de conscientisation, mais de normalisation, de banalisation. Je sais que l’on dit que la littérature n’a pas de responsabilité sociale, que l’art, c’est l’art. Perso, je ne suis pas totalement d’accord. Toutefois, ce n’est que mon humble opinion.

 

Hormis cela, du côté du style littéraire, des passages sont rédigés sans ponctuation, pour rythmer le récit et transmettre l’émotion d’Alexandre, ce qui fonctionne très bien. 

 

Je trouve ça dommage, parce que si ce n’avait pas été du gros enjeu hyper important que j’ai souligné, j’aurais sûrement beaucoup aimé le roman. 

Commentaires

Messages les plus consultés de ce blogue

Qimmik

Désir noir : histoire d’un féminicide

Ces eaux qui me grugent : un beau troisième roman pour Dany Leclair