Le sang des innocents / All the sinners bleed,

 English review follows

Un jeune homme noir, Latrell, assassine en pleine classe un enseignant blanc adoré de tous, avant d’être abattu par la police alors qu’il venait de sous-entendre que le prof n’était pas parfait, mais plutôt l’inverse et qu’on pouvait trouver dans son téléphone des choses incriminantes. 

 

Chargé de l’investigation, Titus Crown est le premier shérif noir de Charon County après des années du règne de son prédécesseur corrompu. C’est une dure position à tenir, car d’une part les blancs s’en méfient, d’autre part les Afro-Américains le considèrent comme un traître. L’enquête le mène à un champ où son équipe retrouve plusieurs cadavres d’adolescents afro-américains d’une quinzaine d’années, découverts parmi les racines d’un arbre, avec des inscriptions religieuses tailladées dans leur peau. S’ensuit une longue et complexe traque pour mettre la main sur le tueur.  

 

S.A. Cosby explore le racisme qui est si frontal, mais aussi si insidieux qu’il s’imbrique dans chaque aspect de cette petite ville, le trafic d’opiacés et le fanatisme religieux. Le contexte du sud des États-Unis y est très bien présenté. Cosby dépeint avec éloquence les tensions raciales avec les suprémacistes blancs et autres sécessionnistes qui tiennent à la statue d’un soldat confédéré, objet qui canalise les tensions entre ceux-ci et les Afro-Américains. De même pour l’omniprésence de la religion, qui ne m’a pas dérangé alors que dans Je suis la maman du bourreau, de David Lelait-Helo, ça m’avait carrément énervé. Probablement parce que l’écriture de Cosby la présente de manière plus organique.

 

Au départ, j’avais un peu de difficulté à apprécier le fameux shérif. Titus Crown est un idéaliste. Il veut changer le monde. Même si on sait qu’il est arrivé quelque chose qui a causé son départ du FBI et qu’il a peut-être un côté sombre (triste, marqué par le passé, cynique sur Dieu, ce qui est rare dans le sud où la religion est très importante). On comprend que les circonstances dans lesquelles il a quitté le FBI ne sont pas reluisantes et on a hâte de les apprendre. Cela viendra. Tranquillement. Dans la deuxième moitié de l’aventure. Au départ, je trouvais qu’il était un peu plat. Trop posé. Il n’est pas moralisateur, mais il exige beaucoup de lui-même et le respect des règles et de la loi est fondamental pour lui. Au fil de l’histoire, on saisit davantage la rondeur de l’individu et on a de l’empathie pour lui ainsi que pour d’autres protagonistes. 

 

Un roman qui rassemble des personnages bien développés, une intrigue complexe et soutenue ainsi qu’une représentation d’une grande justesse des enjeux du sud des États-Unis.

 

J’ai lu Le sang des innocents en version originale (All the sinners bleed) et j’ai pu apprécier encore plus la musicalité de la langue du sud, les expressions colorées, imagées. Quelque chose que la traduction, si bonne soit-elle, ne peut pas rendre de façon aussi précise. Alors si vous êtes à l’aise avec l’anglais, je vous le recommande fortement.

 

 

 

 

A young black man, Latrell, murdered a beloved white teacher in class, before being shot down by the police after he had just implied that the teacher was not perfect, but rather the opposite and that incriminating things could be found in his phone. In charge of investigation, Titus Crown is the first black sheriff of Charon County after years of the reign of his corrupt predecessor. It is a harsh position to hold, because on the one hand he has trouble being respected and trusted by the Caucasians citizens, on the other hand the African Americans consider him a traitor. His investigation leads him to a field in which his team finds the bodies of African-American teenagers with religious inscriptions carved into their skin among the roots of a tree. There follows a long and complex hunt to get their hands on the killer.

 

S.A. Cosby explores racism which is so frontal, but also so insidious that it is infringed in every aspect of this small town, opiate trafficking and religious fanaticism. The context of the southern United States is very well presented. He eloquently portrays racial tensions with white supremacists and other secessionists who want to hold on to the statue of a Confederate soldier, an object that channels tensions between them and the African-Americans. Likewise for the omnipresence of religion, which did not disturb me unlike in Je suis la maman du bourreau, from David Lelait-Helo, where it had downright annoyed me. Probably because Cosby's writing presents it more organically.

 

At first, I had a little trouble appreciating the sheriff. Titus Crown is an idealist. He wants to change the world and is a little bit rigid. Even if we know that something has happened that caused his departure from the FBI and that he may have a dark side (sad, marked by the past, cynical about God, which is rare in the south where religion is very important). We understand that the circumstances in which he left the FBI are not shiny and we can't wait to learn what they are. It comes slowly. In the second half of the adventure. So, as I was saying, at first, I thought he was a bit stuffy. He is not moralizing, but he’s a perfectionist and rigid, requiring a lot of himself and respecting every rule and law is so important to him, it bothered me a bit. Over the course of history, the roundness of the character is more complete and we feel empathy for him as well as for other protagonists.

 

A novel that brings together well-developed characters, a complex and sustained intrigue as well as a representation of a great accuracy of the challenges of the South of the United States.


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